La lutte contre l’IPTV illégal se poursuit !

L’IPTV illégal, mis à disposition par des hackers, profite à plus d’un demi-million d’utilisateurs en Belgique via un boîtier et un abonnement obtenus auprès d’un revendeur local. Nous allons voir que cela ne se fait pas sans risques.

© Quentin Peeters

Pourquoi est-ce illégal ? 

Ce n’est pas l’IPTV en soi qui est illégal mais bien son utilisation et, en l’occurrence, la manière dont on accède à un contenu qui est en principe réservé aux abonnés. Ainsi, le signal envoyé par des opérateurs légitimes/ayants-droits (ex : Netflix, Disney+) est détourné et mis à disposition contre le paiement d’un montant annuel ou mensuel dérisoire par rapport aux centaines de chaînes accessibles. Communément, cette pratique est qualifiée de « piratage » dans la mesure où les pertes en droits de diffusion et de propriété intellectuelle se chiffrent à plusieurs milliards d’euros annuellement. Pour certains, il s’agit d’une forme de contrefaçon. 


Quels sont les risques encourus ? 

Dans un précédent article (voir infra), il a été précisé que ce sont surtout les hackers qui courent le plus de risques parce qu’ils constituent les cibles privilégiées des autorités. Ajoutons que les revendeurs locaux ne sont pas à l’abri de poursuites car la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) a considéré que « la vente d’un lecteur qui permet de regarder du streaming illégal sur un écran de télévision est constitutive d’une violation du droit d’auteur et le vendeur commet une contrefaçon de droit d’auteur ».

Néanmoins, de récentes informations en la matière confirment que, dans les faits, les utilisateurs finaux ne sont pas non plus exempts de problèmes. Certes, sur les plans pénal et civil, ils ne constituent pas une priorité de la politique criminelle de la justice belge. Notons pourtant qu’en Italie, la justice a condamné près d’un millier d’utilisateurs. En outre, les polices française et italienne ont annoncé, à la suite de la saisie de matériel dans le cadre d’opérations chez des hackers, qu'il leur sera plus aisé de remonter aux clients.
Autrement, pour procéder à ce type d’identification, il suffit de repérer l’adresse IP d’un abonné quand il se connecte.

De proches événements montrent en outre que d’autres conséquences plus concrètes sont à craindre. Voyons la nature des principales plaintes.
Premièrement, on peut épingler des risques en matière de cybersécurité. Quelques utilisateurs ont subi un piratage de leur Smart TV, ce qui a permis de les espionner, notamment de les écouter. Evidemment, les risques dépendent des caractéristiques de l’appareil et des systèmes de protection face aux malwares. Ces logiciels malveillants peuvent aussi se propager au sein du réseau domestique dans un contexte où les objets connectés se multiplient et servir aux vols et à la fraude d’identité.
Dans un même registre, lorsque l’on paie l’abonnement à l’aide d’une carte de crédit, on transmet des informations bancaires, sans qu’elles ne soient protégées adéquatement. Plus nombreux sont ceux qui ont eu à se plaindre de la diffusion de leurs données à caractère personnel. En effet, non seulement les réseaux de l’IPTV illégal ne garantissent pas la protection des données, ce qui les rend accessibles aux hackers mais, qui plus est, ils les exploitent bien souvent en les revendant seules ou avec des informations sur les habitudes de consommation (programmes regardés, heures d’écoute, …).
 

Réactions des autorités et des ayants droit 

D’abord, les ayants droit exercent un important lobbying pour convaincre le parlement européen de prendre de nouvelles initiatives législatives qui, peut-être, viseront plus particulièrement les consommateurs. En attendant, différents Etats au sein de l’UE ont adopté des législations plus sévères. Ainsi, l’Italie a voté une loi punissant les utilisateurs à une amende de 5000 euros.

Ensuite, des opérations judiciaires importantes ont été réalisées notamment en Italie et en Grande-Bretagne entraînant des sanctions lourdes. Plusieurs dizaines de sites de streaming illégaux ont ainsi été fermés.
La Suède a adopté une stratégie originale qui consiste à s’attaquer au phénomène sur le plan fiscal, plutôt que du point de vue du droit d’auteur, en considérant que les revendeurs de boîtiers ne déclaraient pas leurs revenus et ne s’acquittaient pas de la TVA.
Récemment, le Centre européen de lutte contre la criminalité financière et économique d’Europol a apporté son appui au service néerlandais d’information et d’enquête fiscales (FIOD). Grâce à son soutien analytique, les principaux auteurs ont été identifiés et des perquisitions ont été menées simultanément dans plusieurs villes des Pays-Bas. Cela a permis de mettre fin à un service IPTV illégal desservant plus d’un million d’utilisateurs en Europe.

Rappelons pour terminer que le piratage économique concerne tant les ayants droit que les Etats dont les revenus sont affectés par cette fraude qui ne leur permet pas de percevoir les impôts et taxes dus. Ce sont donc les services légitimes qui doivent contribuer de manière plus importante.
 

Lire aussi : Quand l’IPTV rime avec contrefaçon


Claude BOTTAMEDI
Chef de corps d’une zone de police er

Sources :
Rapport « DIGITAL PIRACY METHODS », Interpol, septembre 2023, sur :
https://www.interpol.int/Crimes/Illicit-goods/Shop-safely/Digital-piracy

Arrêt du 26 avril 2017, Stichting Brein contre Jack Frederik Wullems,   C‑527/15, CJUE (deuxième chambre).

Regulation (EU) 2022/2065 of the European Parliament and of the Council of 19 October 2022 on a Single Market For Digital Services and amending Directive 2000/31/EC (Digital Services Act) (Text with EEA relevance), sur :
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A32022R2065&qid=1666857835014

 

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