L’outrage, une atteinte à l’autorité

Afin de protéger l’autorité publique, le législateur a prévu de punir les atteintes à la dignité de ses dépositaires en incriminant "l’outrage". Quelles personnes sont protégées ? Dans quelles conditions cette infraction est-elle établie ? 

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Qui est protégé par la loi ?

Sans doute, la loi vise avant tout à protéger une fonction, une autorité, plutôt que son détenteur lui-même. Elle procède aussi à des distinctions quant à la hauteur des sanctions applicables en fonction de la catégorie à laquelle appartient le dépositaire de l’autorité outragé.

En omettant les différentes sanctions, la loi concerne les personnes suivantes :

  • Un membre des Chambres législatives dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de son mandat ;
  • Un ministre, un membre de la Cour constitutionnelle, un magistrat de l’ordre administratif (ex : un magistrat du Conseil d’Etat, un gouverneur de province ou un bourgmestre) ou un membre de l’ordre judiciaire (ex : un procureur du Roi, un juge), ou un officier de la force publique, en service actif dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ;
  • Un officier ministériel (ex : un huissier de justice ou un notaire), un agent dépositaire de l’autorité ou de la force publique (ex : un inspecteur de police, un sous-officier de la police militaire, un agent de l’administration des finances, un inspecteur du travail, etc.) ou toute autre personne ayant un caractère public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ;
  • Les jurés à raison de leurs fonctions ou les témoins à raison de leurs dépositions.

Il faut ajouter que les outrages commis envers les corps constitués (ex : Cour des comptes, Conseil d’Etat, etc.) seront punis de la même manière que les outrages commis envers les membres de ces corps.

 

Quels actes sont punissables ?

Ce sont toutes les manières d’exprimer son mépris, de vouloir rabaisser, injurier ou blesser une des personnes précitées. Il peut s’agir de paroles (ex : injures ou moqueries), de faits (violences légères différentes de coups ou de gestes (mimiques, grimaces, faire un bras d’honneur, etc.) voire de menaces (ex : « j’en référerai à vos supérieurs… »).

Il appartiendra au juge d’estimer si les propos tenus ou les faits commis sont effectivement injurieux.

En principe, les écrits ne font pas partie des actes punissables sauf si par exemple, ils sont remis directement au fonctionnaire concerné.

A noter que déposer une plainte pour une infraction inexistante dans un service de police dans le but de le ridiculiser constitue un outrage. Par contre, le simple refus d'obtempérer de se soumettre à un contrôle routier ne constitue pas un outrage à agent. D’autres infractions au code de la route sont néanmoins possibles (ex : refus de se soumettre à un test d’alcoolémie).

Mais en toute hypothèse, il s’impose que l’auteur ait eu la volonté d’outrager. Cela n’implique toutefois pas que la victime se soit personnellement sentie injuriée. En effet, par-delà la personne, c’est la fonction que l’on veut préserver. Il suffit que l’auteur connaisse les fonctions de la victime sans qu’il soit imposé qu’elle en porte les insignes ou qu’elle soit revêtue de son uniforme.

 

Dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions

Comme nous l’avons déjà indiqué, c’est bien la fonction et non la personne qui est protégée. Il en résulte que l’infraction n’existe que si les faits ont lieu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice du mandat ou des fonctions. Exercer ses fonctions, cela revient à poser des actes relevant de ses compétences (ex : un policier qui effectue des contrôles routiers) et ce, y compris les déplacements utiles pour réaliser une mission. De même, il n’est pas nécessaire que les faits aient été commis dans un lieu public.

On notera néanmoins qu’il est admis qu’un policier en uniforme qui pose un acte étranger à ses fonctions (ex : achète un pain), puisse être outragé.

La question se pose également de savoir si l’outrage doit avoir eu lieu en présence de la victime ? En principe, cette présence est nécessaire mais il suffit néanmoins que l’acte ait été perçu par la personne outragée ou qu’il lui ait été rapporté.

Rappelons qu’en dehors de ces situations, des poursuites peuvent aussi être envisagées du chef d’injures (art.448 du Code pénal).

Enfin, il convient aussi de noter que l’infraction est établie lorsqu’elle a lieu à l’occasion de l’exercice des fonctions. Cette hypothèse se distingue de la présente d’un point de vue temporel en envisageant les cas où l’acte de la fonction a déjà été établi et le sera dans le futur. Par exemple, un quidam tient des propos injurieux envers un policier qui l’a verbalisé la semaine précédente à la suite d’une infraction au code de la route.

En la matière, il importe peu que la victime se trouve en dehors de ses heures de service lorsqu’elle a subi les outrages.

On considère que l’infraction n’est pas établie lorsque la personne protégée a, de manière manifeste, agi illégalement, soit qu’elle a posé des actes en dehors de sa compétence d’attribution voire de sa compétence territoriale.  

Claude BOTTAMEDI

Chef de corps d’une zone de police er

Sources :

A. DE NAUW et F. KUTY, Manuel de droit pénal spécial, Waterloo, Kluwer, 2014

MAGNIEN, P., « La rébellion, les outrages et les violences », in Les infractions contre les personnes, vol. 2, Bruxelles, Larcier, 2010, pp. 26 à 37

Code pénal sur : https://www.ejustice.just.fgov.be/eli/loi/1867/06/08/1867060850/justel#LNK0072

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